Veille juridique droit public / infrastructures du 10 avril 2023

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L’équipe de Droit Public du bureau de Paris vous propose de retrouver l’actualité récente française et européenne concernant le droit des contrats publics et le droit de la commande publique. Vous bénéficiez d’une sélection ainsi que d’une analyse de la jurisprudence et des textes réglementaires dans les deux dernières semaines.


Commande publique : défaut d’impartialité

Un arrêt récent illustre la problématique du défaut d'impartialité dans les procédures de la commande publique à propos des conditions de l'intervention d'un assistant à maîtrise d’ouvrage du pouvoir adjudicateur, dont le dirigeant était également le dirigeant de la société que l'offre du groupement attributaire désignait comme son fournisseur.

Le Conseil d'Etat rappelle que "Le principe d'impartialité, principe général du droit, s'impose au pouvoir adjudicateur comme à toute autorité administrative. Sa méconnaissance est constitutive d'un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence". Analysant de manière concrète les modalités d'intervention de l'AMO, il juge que le fait que l'AMO ait participé à l'analyse et l'évaluation des offres dans le cadre de la procédure de passation du marché litigieux est constitutif d'une méconnaissance du principe d'impartialité. En revanche, il considère que "il ne résulte de l'instruction aucune circonstance de nature à faire naître un doute sur le fait que cette société aurait élaboré le règlement de la consultation et les pièces du marché de façon à favoriser l'offre qui indiquerait utiliser le logiciel commercialisé par la société avec laquelle elle partage des intérêts". En conséquence, il annule la procédure d'attribution du marché, mais seulement au stade de l'analyse des offres, le pouvoir adjudicateur pouvant reprendre la procédure à ce stade sans l'intervention de son AMO.

CE du 28 février 2023, n° 467455


Commande publique : offres anormalement basses

Saisi de la légalité du rejet d’une offre jugée anormalement basse par un pouvoir adjudicateur, le Conseil d’Etat rappelle la procédure à suivre par l’acheteur pour traiter ce type d’offre.

D’abord, et quelle que soit la procédure mise en œuvre, l’acheteur doit solliciter auprès de l’auteur de l’offre jugée anormalement basse « toutes précisions et justifications de nature à expliquer le prix proposé, sans être tenu de lui poser des questions spécifiques ». Ensuite, l’offre doit être rejetée si les précisions et justifications ne sont pas suffisantes pour que ce prix ne soit pas regardé comme manifestement sous-évalué et de nature à compromettre la bonne exécution du marché. A cet égard, « [l]e caractère anormalement bas ou non d'une offre ne saurait résulter du seul constat d'un écart de prix important entre cette offre et d'autres offres que les explications fournies par le candidat ne sont pas de nature à justifier et il appartient notamment au juge du référé précontractuel, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si le prix en cause est en lui-même manifestement sous-évalué et, ainsi, susceptible de compromettre la bonne exécution du marché ».

En l’espèce, après avoir demandé les précisions et justifications nécessaires, la communauté d’agglomération avait à juste titre rejeté l’offre en question au vu des imprécisions, carences et incohérences des réponses données par la société requérante.

CE du 14 mars 2023, n°465456


Commande publique : information suffisante des candidats à l’attribution de concessions

Dans un récent arrêt portant sur l’attribution de traités de sous-concessions du service public balnéaire, le Conseil d’Etat rappelle que les concessions sont soumises aux principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures. En application de ces principes, « la personne publique doit apporter aux candidats à l'attribution d'une concession, avant le dépôt de leurs offres, une information suffisante sur la nature et l'étendue des besoins à satisfaire » et « indiquer aux candidats les caractéristiques essentielles de la concession ».

En l’espèce, la cour administrative d’appel de Marseille avait considéré que la commune avait entaché la procédure de passation d'un vice qui découlait notamment de l'insuffisante définition de ses besoins, faute pour elle d'avoir précisé le "niveau de standing" des établissements qui était attendu pour chacun des lots. Le Conseil d’Etat a annulé la décision d’appel en considérant que la commune « avait informé les candidats sur les principales caractéristiques du service public concédé, et qu'elle n'était pas tenue de définir cet élément de la stratégie commerciale des établissements exploités sur chacun des lots ».

CE du 10 mars 2023, n° 464830


Compétence du juge judicaire pour les contrats de cession de biens du domaine privé

A l’occasion d’un litige relatif à la résolution de la vente par une commune d’une parcelle de son domaine privé en vue de la construction par l’acquéreur d’un bâtiment à usage industriel et qui comprenait plusieurs stipulations particulières, le Tribunal des conflits a rappelé le principe selon lequel « [l]e contrat par lequel une personne publique cède des biens immobiliers faisant partie de son domaine privé est en principe un contrat de droit privé, sauf si ce contrat a pour objet l’exécution d’un service public ou s’il comporte des clauses qui, notamment par les prérogatives reconnues à la personne publique contractante dans l’exécution du contrat, impliquent, dans l’intérêt général, qu’il relève du régime exorbitant des contrats administratifs ».

En l’espèce, la vente de la parcelle en cause n’avait pas pour objet l’exécution d’un service public, et « ni les clauses par lesquelles la société s’engage, sous une condition résolutoire, à déposer un permis de construire et à réaliser un bâtiment dans certains délais, ni celles qui encadrent le droit de la société de disposer du terrain, ni celles qui encadrent les conditions de retour du bien en cas de résolution de la vente, ni aucune autre clause n’impliquent que, dans l’intérêt général, le contrat relève du régime exorbitant des contrats administratifs ». En conséquence, le Tribunal des conflits a jugé que la demande indemnitaire de la société consécutive à la résolution de la vente pour non-respect du délai de réalisation de la construction relève de la juridiction judiciaire.

TC du 13 mars 2023, n°4266


PPA des collectivités : une durée aménagée pour faciliter leur utilisation

Parmi les nombreux apports de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, il faut noter la création d’un cadre juridique spécifique pour la conclusion par les acheteurs publics de « power purchase agreements » (« PPA ») ou contrats de vente directe d’électricité par les producteurs, qui permettent aux consommateurs finals de s’approvisionner en électricité à des prix stables et sur le long terme.

D’abord, la loi a ajouté dans le Code de l’environnement un article L. 228-5, en vertu duquel « [l]a commande publique tient compte, lors de l'achat de dispositifs de production d'énergies renouvelables, de leur empreinte carbone et environnementale tout au long de leur processus de fabrication, de leur utilisation et de leur valorisation après leur fin de vie ».

Ensuite et surtout, la loi insère un nouvel article L. 331-5 dans le Code de l’énergie, qui prévoit que les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices peuvent recourir à un contrat de la commande publique pour répondre à leurs besoins en électricité produite à partir de sources renouvelables (i) avec un tiers pour la mise en œuvre d’une opération d’autoconsommation individuelle, (ii) dans le cadre d’une opération d’autoconsommation collective avec un ou plusieurs producteurs participant à cette opération, ou (iii) dans le cadre d’un contrat de vente directe à long terme d’électricité, mentionné au 2° du I de l'article L. 333-1 du Code de l’énergie. L’article L. 331-5 du Code de l’énergie précise que la durée de ces contrats « est définie en tenant compte de la nature des prestations et de la durée d'amortissement des installations nécessaires à leur exécution, y compris lorsque le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice n'acquiert pas ces installations ». Ce faisant, la loi facilite le recours des personnes publiques aux PPA en levant la difficulté tenant jusque-là à l’encadrement de la durée des marchés publics. Concrètement, les acheteurs publics pourront désormais conclure des contrats de longue durée pour l’achat direct d’énergie renouvelable.

Loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables

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