Veille juridique DROIT PUBLIC / INFRASTRUCTURES du 19 mai 2022

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L’équipe de Droit Public du bureau de Paris vous propose de retrouver l’actualité récente française et européenne concernant le droit des contrats publics et le droit de la commande publique. Vous bénéficiez d’une sélection ainsi que d’une analyse de la jurisprudence et des textes réglementaires parus dans les deux dernières semaines.

Code la commande publique : achat durable

Le décret n°2022-767 portant diverses modifications du code de la commande publique, pris en application de la loi « Climat et Résilience » du 22 août 2021, prévoit plusieurs dispositions pour une commande publique plus durable. Il supprime la possibilité de définir un critère d’attribution unique fondé sur le prix dans les marchés publics : à compter de 2026, le seul critère unique possible sera le coût, déterminé selon une approche globale qui peut être fondée sur le coût du cycle de vie et qui prend en compte les caractéristiques environnementales de l’offre. En outre, si l’acheteur se fonde sur une pluralité de critères, au moins l’un d’entre eux devra prendre en compte les caractéristiques environnementales de l’offre. S’agissant des concessions, le décret ajoute l’obligation pour les concessionnaires de décrire, dans leur rapport annuel, les mesures mises en œuvre pour garantir la protection de l’environnement et l’insertion par l’activité économique, également à compter de 2026.  Par ailleurs, par une disposition qui est entrée en vigueur dès le 4 mai 2022, il créé une interdiction de soumissionner facultative aux marchés et aux concessions pour les entreprises n'ayant pas satisfait à leur obligation d'établir un plan de vigilance en application du Code du commerce. Enfin, le décret abaisse de 100 à 50 millions d’euros le montant annuel des achats au-delà duquel certains acheteurs doivent élaborer un schéma de promotion des achats socialement et écologiquement responsables. Cette disposition entrera en vigueur le 1er janvier 2023.

Décret n° 2022-767 du 2 mai 2022 portant diverses modifications du code de la commande publique

Sanctions contre la Russie et contrats de la commande publique

La DAJ a publié une fiche technique explicitant le champ d'application et les conditions de mise en œuvre de l'interdiction d'attribuer ou d'exécuter des contrats de la commande publique avec la Russie, découlant du règlement du Conseil de l'Union Européenne du 8 avril 2022.

Cette fiche rappelle notamment que tout contrat en cours au 9 avril 2022, qui ne serait pas échu au 10 octobre 2022, doit être résilié avant cette date.

Mise en œuvre de l’interdiction d’attribuer ou d’exécuter des contrats de la commande publique avec la Russie

Béziers II : pas de suspension du délai de recours en reprise des relations contractuelles en cas de saisine du CCRA

Le Conseil d’Etat avait déjà jugé que l'exercice d'un recours administratif n'est pas de nature à interrompre le délai de deux mois imparti au demandeur pour introduire un recours de plein contentieux tendant à la reprise des relations contractuelles : "Eu égard aux particularités de ce recours contentieux, à l'étendue des pouvoirs de pleine juridiction dont le juge du contrat dispose et qui peut le conduire, si les conditions en sont satisfaites, à ordonner la reprise des relations contractuelles ainsi qu'à l'intervention du juge des référés pour prendre des mesures provisoires en ce sens, l'exercice d'un recours administratif pour contester cette mesure, s'il est toujours loisible au cocontractant d'y recourir, ne peut avoir pour effet d'interrompre le délai de recours contentieux. Il en va ainsi quel que soit le motif de résiliation du contrat et notamment lorsque cette résiliation est intervenue en raison des fautes commises par le cocontractant. Au demeurant, dans cette dernière hypothèse, la personne publique est toujours dans l'obligation de mettre le cocontractant en mesure de faire valoir ses observations avant l'intervention de cette décision" (CE, 30 mai 2012, n° 357151).

Le Conseil d'Etat juge aujourd'hui qu'il en est notamment ainsi de la saisine du comité consultatif de règlement amiable des différends (CCRA) : "s'il est toujours loisible pour une partie à un contrat administratif de recourir, dans les conditions qui étaient prévues à l'article 127 du code des marchés publics, à un comité consultatif de règlement amiable des différends en vue de contester le décompte général d'un contrat à la suite de sa résiliation pour faute, la compétence de ce comité ne s'étend toutefois pas aux litiges tendant exclusivement à la reprise des relations contractuelles, qui relèvent de la seule compétence du juge du contrat. Il suit de là qu'en se fondant sur ce motif pour juger que la saisine de ce comité n'était pas de nature à interrompre le délai de deux mois imparti au demandeur par les règles rappelées au point 3 pour introduire un recours de plein contentieux tendant à la reprise des relations contractuelles, la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas commis d'erreur de droit."

CE du 12 avril 2022, n° 452601

Prescription des actions en responsabilité du maître de l'ouvrage contre les constructeurs ou leurs sous-traitants : 10 ans

Le Conseil d’Etat a précisé les règles applicables en matière de prescription des actions exercées par le maître de l'ouvrage contre les constructeurs ou leurs sous-traitants en considérant que ces actions relevaient de la prescription de 10 ans instituée par l'article 1792-4-3 du code civil, et non de la prescription de droit commun de 5 ans issus de l'article 2224 du code civil : "d'une part, aux termes de l'article 2224 du code civil : "Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ". Le recours d'un constructeur contre un autre constructeur ou son sous-traitant relève de ces dispositions et se prescrit, en conséquence, par cinq ans à compter du jour où le premier a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. D'autre part, l'article 1792-4-3 du code civil dispose que : "En dehors des actions régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés aux articles 1792 et 1792-1 et leurs sous-traitants se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux ". Ces dispositions, créées par la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, figurant dans une section du code civil relative aux devis et marchés et insérées dans un chapitre consacré aux contrats de louage d'ouvrage et d'industrie, ont vocation à s'appliquer aux actions en responsabilité dirigées par le maître de l'ouvrage contre les constructeurs ou leurs sous traitants".

Dans cet arrêt, le Conseil d'Etat précise que cette solution s'applique alors même que l'action en question "ne concerne pas un désordre affectant la solidité de l'ouvrage ou le rendant impropre à sa destination".

CE du 12 avril 2022, n° 448946

Méthode d'analyse des offres : l'appréciation chiffrée n'est pas obligatoire

Le Conseil d’Etat a eu l'occasion de rappeler le principe de libre détermination de la méthode d'analyse des offres, et de confirmer que les principes généraux qui encadrent celle-ci n'impliquent pas obligatoirement de procéder à une appréciation chiffrée des différents critères. Il a ainsi censuré la décision du juge des référés qui avait annulé la procédure au motif que la méthode d'analyse des offres en cause laissait "une trop grande part à l'arbitraire". Le Conseil d'Etat a validé la méthode retenue en l'espèce par l'autorité concédante dans ces termes : "l'autorité concédante a, pour évaluer les offres qui lui étaient soumises, associé à chacun des critères hiérarchisés qu'elle avait fixés et rendus publics une appréciation qualitative des offres. Cette appréciation était composée d'une évaluation littérale décrivant les qualités des offres pour chaque critère, suivie d'une flèche qui la résumait. Dans le cadre de cette méthode, une flèche verte orientée vers le haut représentait la meilleure appréciation, une flèche rouge vers le bas la moins bonne, tandis que des flèches orange orientées en haut à droite ou en bas à droite constituaient deux évaluations intermédiaires. Elle a enfin classé les offres au regard de l'appréciation qu'elle avait portée sur chacun des critères. Il résulte des principes énoncés au point 5 que cette méthode d'évaluation des offres, qui permet de comparer et de classer tant les évaluations portées sur une même offre au titre de chaque critère que les différentes offres entre elles, n'est pas de nature à priver de leur portée ces critères ou à neutraliser leur hiérarchisation et n'est, par suite, pas entachée d'irrégularité."

CE du 3 mai 2022, n° 459678

Groupement et appréciation des capacités du candidat

Les directives relatives à la commande publique autorisent les candidatures présentées sous forme de groupement, et prévoient la possibilité pour le groupement candidat de se prévaloir des capacités d'un de ses membres. Saisie d'une question préjudicielle, la CJUE a précisé que cette disposition s'oppose à une réglementation nationale selon laquelle, en cas de candidature sous la forme d'un groupement, le mandataire du groupement doit satisfaire l'ensemble des critères imposées par l'avis en termes de capacité technique et financière, et exécuter une part majoritaire des prestations objet du marché.

La CJUE relève ainsi que, selon le régime institué par la directive 2014/24 "ce sont les pouvoirs adjudicateurs qui peuvent exiger que certaines tâches essentielles soient effectuées directement par le soumissionnaire lui-même ou, si l’offre est soumise par un groupement d’opérateurs économiques (…), par un participant dudit groupement, alors que, selon le droit national en cause au principal, c’est le législateur national qui, de façon horizontale, impose pour tous les marchés publics en Italie que le mandataire du groupement d’opérateurs économiques exécute la majorité des prestations", ce qui porte atteinte à la finalité poursuivie par la législation de l'Union en la matière, d’ouvrir les marchés publics à la concurrence la plus large possible.

CJUE du 28 avril 2022, n° C-642/20

Référé contractuel et avenant

A l'instar de qu'il avait jugé pour le référé précontractuel (CE, 11 juillet 2008, n°312354), le Conseil d’Etat a jugé que le référé contractuel n'est ouvert à l'encontre d'un avenant que lorsque la passation dudit avenant est soumise aux obligations de mise en concurrence, parce que cet avenant ne rentre pas dans la catégorie des modifications en cours d'exécution d'un marché qui peuvent être apportées sans qu'une nouvelle mise en concurrence soit organisée: "Il n'entre dans la compétence du juge du référé contractuel, telle que définie par l'article L. 551-13 du code de justice administrative, de statuer sur un avenant à un contrat que lorsque la conclusion d'un tel accord est soumise aux règles de publicité et de concurrence qui s'appliquent à la passation des contrats visés aux articles L. 551-1 et L. 551-5."

En l'espèce, un tel référé contractuel a été jugé recevable contre l'avenant considéré, mais seulement en ce qu'il actait un changement dans la composition du groupement titulaire (dans des circonstances qui ne correspondaient pas aux hypothèses autorisées en la matière par le code).

CE du 16 mai 2022, n° 459408

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